Mardi 17 juin 2025, la CNCDH a adopté un avis dans lequel elle alerte sur les menaces qui pèsent sur l’espace civique en France. Elle appelle les pouvoirs publics à prendre la mesure du danger.

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Mis à jour le 24 juin 2025

L’espace civique est un des fondements les plus précieux des sociétés démocratiques. Les Nations unies le définissent comme « l’environnement qui permet à la société civile de jouer un rôle dans la vie politique, économique et sociale ». L’espace civique est le lieu d’expression de la pluralité des opinions, qui permet aux concitoyennes et concitoyens de s’exprimer, de débattre, de s’organiser en associations, de proposer.  L’espace civique est le creuset dans lequel naissent les mobilisations sociales, se forgent les contre-pouvoirs, s’épanouissent les voix de la société civile. « Pierre angulaire des démocraties qui fonctionnent » (OCDE), l’espace civique est aujourd’hui menacé. 

C’est pourquoi, dans la continuité de ses avis sur les défenseurs (2023) et les procédures-bâillons (2025), la CNCDH se saisit du sujet et alerte : « Défendre cet espace, c’est défendre notre capacité à espérer, à contester, à construire ensemble un avenir plus, plus libre, plus humain. »

Les atteintes contre l’espace civique viennent de toute part

  • Dénigrement des défenseurs des droits : les militants écologiques sont qualifiés d’« écoterroristes », l’engagement des associations, des ONG est identifié comme « extrémiste », leurs actions sont vues comme potentiellement attentatoires à l’ordre et à la sécurité nationale. Ce dénigrement est opéré par des acteurs politiques et certains médias.
  • Attaques contre la liberté académique : Pressions et accusations idéologiques (wokisme, islamo-gauchisme) fragilisent la recherche, notamment en sciences sociales ou sur le changement climatique.
  • Intimidations par des groupes de pression : Violences physiques, harcèlement en ligne, et procédures judiciaires abusives (procédures-bâillons) visent journalistes, ONG, avocats, syndicalistes…
  • Discrimination syndicale persistante : l’engagement syndical augmente le risque d’être victime de discrimination et de sanctions et l’absence de données empêche de mesurer l’ampleur du phénomène. .

Les politiques publiques contribuent à la réduction de l’espace civique 

L’engagement insuffisant de l’Etat pénalise les acteurs de la société civile

  • Faible prise en compte de la société civile : Malgré des consultations fréquentes, les recommandations citoyennes influencent peu les décisions politiques et la construction des politiques publiques, et sont d’autant plus écartées lorsqu’elles critiquent l’action publique.
  • Soutien structurel défaillant : Baisse de subventions, lourdeur et complexité des démarches administratives, auxquels s’ajoutent certains propos qui questionnent le bien-fondé du financement, fragilisent les associations.
  • Absence de protection face aux attaques : L’État condamne peu fermement les menaces et violences (notamment les campagnes de haine xénophobe), laissant des projets pourtant portés par l’Etat être mis en péril.

 

Des évolutions législatives et règlementaires restreignent l’espace civique

  • Surveillance accrue organisée : Fichage des militants autorisé par décrets, ), collecte de données sur les manifestants – notamment via les outils numériques, mise en place de la cellule DEMETER (Cellule nationale de suivi des atteintes au monde agricole — ces pratiques génèrent de la peur et limitent l’engagement.
  • Rupture aggravée de la confiance entre les associations et les pouvoirs publics du fait la loi du 24 août 2021 confortant les principes de la République (sur laquelle la CNCDH avait alerté en janvier puis mars 2021).
  • Atteintes manifestes à la liberté de réunion et de manifestation (qui inclue la désobéissance civile) : interdictions récurrentes de manifester (qui touchent toutes les catégories de mobilisation), usage excessif de la force, recours abusif à des stratégies de prévention puis de maintien de l’ordre, intimidations.

La CNCDH appelle les pouvoirs publics à prendre la mesure des risques encourus et à conjurer les menaces qui pèsent sur l’espace civique, dont la vitalité est une condition non négociable de toute démocratie digne de ce nom.

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